Le pays du matin calme, dont la tradition bouddhiste est millénaire, compte aujourd'hui près de 30 %de chrétiens. Une communauté qui s'est développée de façon unique depuis le XIXe siècle.
Entre écrans géants et enseignes clignotantes, des croix lumineuses rouges ou blanches ornent le ciel de Séoul. Ce paysage nocturne insolite est révélateur de la présence chrétienne en Corée du Sud. Avec plus de 10 % de catholiques et 19 % de protestants, ce pays, jamais colonisé par une puissance occidentale, fait figure d'exception en Asie.
Au XIXe siècle, les premiers missionnaires français, puis américains, arrivent sur la péninsule. Ils construisent alors de grands hôpitaux et des universités prestigieuses. Au lendemain de la guerre de Corée, la présence américaine au sud consacre le culte protestant.
Les protestants dominent
Aujourd'hui, c'est au tour des protestants sud-coréens de convertir d'autres fidèles. Ils sont 16 000 installés dans 170 pays. À l'intérieur des frontières aussi le prosélytisme va bon train. Dans les rues du quartier de Myeongdong, des hommes-sandwichs prêchent la bonne parole avec des mégaphones. Un peu plus au sud de la capitale, l'Église de Yeouido dit compter plus de 750 000 membres et être ainsi la plus grande paroisse du monde.
Revers de la médaille : une majorité de non-chrétiens ont une image négative des protestants, jugés particulièrement agressifs dans leurs méthodes. Récemment, des pratiquants se sont introduits dans des temples bouddhistes pour y faire leurs prières.
Si les églises chrétiennes sud-coréennes sont si dynamiques, c'est aussi parce qu'elles ont su s'approprier le christianisme. Le chamanisme traditionnel transparaît, par exemple, dans les pratiques. « Ici, les prières sont beaucoup plus émotionnelles et démonstratives », constate Esther, jeune Chinoise installée à Séoul. Autre particularité : le poids de la hiérarchie et le respect des anciens, marques de la pensée confucianiste. « En Corée, impossible de devenir pasteur en dessous d'un certain âge. C'est pourquoi je suis parti aux États-Unis à la fin de mes études », témoigne Kim Bom-su.
Un pèlerinage dans la province de Shaanxi en Chine. Les catholiques du pays résistent autant qu'ils le peuvent à la pression du Parti communiste. CHINA PHOTOS/GETTY IMAGES |
« Aujourd'hui, les protestants dominent la société sud-coréenne », confie Park Jong-gou, professeur de théologie à l'Université de Sogang. Dans le monde politique comme dans la vie professionnelle, il est toujours plus facile de se faire une place si l'on a des bonnes fréquentations sur les bancs de l'Église. Rhee Syngman, élu premier président de la République de Corée du Sud en 1948, était un protestant convaincu.
Le président actuel, Lee Myung-bak, affiche ouvertement la même foi. Seong-kyun, jeune employé du ministère des Affaires étrangères, va à l'église tous les dimanches. Pour lui, pas de doute : « Si la Corée a accompli démocratisation et progrès économiques fulgurants ces vingt dernières années, c'est avant tout grâce aux prières des chrétiens. »
Eva JOHN.
LIRE AUSSI :
» PAKISTAN - Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème
» CUBA - Oswaldo Payá, l'infatigable dissident chrétien
» ÉGYPTE - «Les coptes ne doivent plus se laisser faire»
» CHINE - Dong Baolu, la solitude d'un prêtre «souterrain»
» IRAK - «Les extrémistes veulent nous chasser du pays»
» KOSOVO - «Ici, l'héritage chrétien de l'Europe risque de disparaître»
» ALGÉRIE - «Être chrétien, c'est un combat quotidien»