Source: lepoint.fr
Pékin pourrait apporter un soutien décisif à la zone euro pour surmonter ses problèmes de dette. Une aide intéressée.
Par Marc Vignaud
Le salut de l'Union européenne viendra-t-il de l'Empire du Milieu ? Empêtrée dans une crise de la dette sans précédent, la zone euro devrait, en tout cas, pouvoir compter sur le soutien de la Chine en 2011. Depuis quelques mois, les responsables chinois ont multiplié les déclarations d'intentions bienveillantes envers leur premier partenaire commercial. Dernière en date, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Jiang Yu. "À l'avenir, l'Europe sera un de nos principaux marchés pour investir nos réserves de change", a-t-elle affirmé jeudi. Deux jours plus tôt, lors d'un sommet Union européenne-Chine à Pékin, le vice-Premier ministre Wang Qishan avait déclaré que son pays était prêt à soutenir les mesures de l'UE et du FMI pour assurer la stabilité financière de l'Europe.
En visite au Portugal le mois dernier, le président chinois en personne, Hu Jintao, avait assuré le pays lusophone de son soutien, des officiels promettant même des achats d'obligations d'État. Selon le quotidien portugais Jornal de negocios, la Chine est prête à acheter quatre à cinq milliards d'euros de dette souveraine portugaise. En Grèce, c'est le Premier ministre chinois qui a promis, en octobre dernier, des achats de titres grecs.
Bon accueil européen
Avec ses 2.648 milliards de dollars de change fin septembre, la Chine est capable de réussir là où la solidarité des membres de la zone euro (et de l'ensemble de l'Union européenne) a pour l'instant échoué. En dépit de l'instauration d'un fonds de stabilisation financière d'un montant de 440 milliards d'euros, activable en cas d'incapacité d'un membre à financer sa dette sur les marchés, les investisseurs ne sont, en effet, toujours pas rassurés. Les responsables européens, qui peinent à se mettre d'accord sur des mesures susceptibles de mettre un terme à l'incertitude qui règne sur la soutenabilité de la dette de certains membres, ont donc bien accueilli l'offre de service des Chinois : "Nous saluons le soutien exprimé par les autorités chinoises pour la stabilité de la zone euro", s'est félicité, mardi, le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn.
Des contreparties politiques
Le soutien du géant chinois pourrait cacher des arrière-pensées. "L'image globale d'un pays en développement sauvant de la faillite un pays développé suffit probablement à la Chine pour offrir son assistance", considère Alistair Thornton, spécialiste de la Chine chez IHS Global Insight. Mais elle a aussi un intérêt économique direct à préserver la santé économique de l'Europe, son principal débouché commercial... Les Chinois font d'une pierre deux coups : ils atténuent leur dépendance à la dette américaine, rendant les Européens redevables.
Pékin pourrait ainsi chercher à obtenir la fin de l'embargo européen sur les ventes d'armes encore en vigueur. L'Union européenne affirme qu'aucune promesse n'a été faite aux Chinois en échange de leur soutien, mais la pression est forte.
D'ailleurs, l'Empire du Milieu doit encore passer aux actes, après les déclarations de bonnes intentions. Signe que celles-ci tardent à convaincre, elles n'ont pas eu d'effets concrets sur les taux réclamés par les marchés pour détenir de la dette portugaise ou grecque. Selon des analystes cités par l'Agence France-Presse, l'essentiel de la dette souveraine européenne détenue par la Chine, dont le montant n'est pas rendu public, serait d'ailleurs encore composé d'obligations françaises et allemandes.