Même les héros peuvent se fatiguer. Après vingt ans de bons et loyaux services, deux d'entre eux prennent enfin une retraite méritée : le commissaire Kurt Wallander et l'inspecteur John Rebus, personnages célèbres d'Henning Mankell et de Ian Rankin, viennent de poser leurs armes et de laisser leurs galons au vestiaire - au moins provisoirement.
Souci de réalisme ? Fatigue ou lassitude des écrivains à l'égard de leurs créatures ? Quoi qu'il en soit, ces fins de carrière paisibles n'étaient pas envisageables il y a un siècle, époque où les figures de la littérature populaire traditionnelle étaient dotées d'une jeunesse éternelle et d'un dynamisme à toute épreuve.
Reste que les héros récurrents n'ont pas dit leur dernier mot. Si leur présence dans la littérature remonte au Moyen Age, c'est avec Honoré de Balzac, Edgar Allan Poe mais aussi Emile Zola que le procédé a été élevé au rang de système, notamment par l'intermédiaire des romans-feuilletons. Familier, solidement campé, ce type de personnage est consubstantiel à la naissance des littératures dites "de genre", qu'il s'agisse du roman policier, de la bande dessinée ou de la littérature jeunesse.
Aujourd'hui, ces littératures continuent d'explorer, voire d'exploiter abondamment un "filon" qui joue sur l'attachement des lecteurs à des personnages et à leur désir de les voir évoluer de livre en livre.