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Affaire Longuet, l'horreur suprême : un sol, une consonance, une religion 12 Mars 2010 Par Denys Pouillard

Les propos tenus par le président du groupe UMP du Sénat ne peuvent être considérés comme accidentels. Patrick Roger, dans Le Monde reprenait les mots exacts de Gérard Longuet qui ne se contente pas d'un seul «corps français traditionnel».

Rappelons qu'aux dernières universités d'été de l'UMP, ce n'était pas uniquement la phrase de Brice Hortefeux qu'il fallait retenir. Les ricanements et allusions de militantes autour du ministre de l'intérieur, enregistrés et peut-être même insuffisamment diffusés ou rediffusés, traduisaient le profond dérapage jusqu'où mène l'humour lorsqu'il se décline sur le modèle de la discrimination positive !

Lors de l'émission sur la chaîne « Public-Sénat », le président du groupe sénatorial UMP a prolongé son argumentation comme s'il voulait, absolument, trouver une justification à sa construction, pas si personnelle mais partagée, de l'identité française : un sol, une consonance, une religion . « J'aimais bien Schweitzer, parce qu'il parlait au nom d'une certaine tradition. En quelque sorte, c'est le primat des Gaules qui défendait la lutte contre les discriminations Schweitzer, c'est parfait. Un vieux protestant, la vieille bourgeoisie protestante, parfait ».
De quel droit un homme politique se permet de livrer sur les ondes, sans y être autorisé, la religion d'une autre personne. Qui plus est... associer cette appartenance religieuse à un code de bonne conduite qui détermine les religions qui auraient, donc, droit à « l'investiture » et celle qui en seraient écartées !

Comment des sénateurs UMP, certains appartenant aux loges maçonniques, peuvent-ils accepter une telle intolérance, une telle discrimination volontaire. Le « corps français traditionnel » de Gérard Longuet s'appuie donc sur l'appartenance à un sol qui exclut le « symbolique extérieur », à la consonance d'un patronyme ou d'un simple prénom, à la pratique d'une religion « conforme » aux racines chrétiennes de l'Europe que certains se proposaient d'imposer dans le préambule de la constitution européenne, peut-être même - puisque le mot a été prononcé - de l'appartenance à une bourgeoisie rassurante et gage de respectabilité.

De tels propos n'engagent, selon un porte-parole de l'UMP, que l'intéressé ! Non...Ils engagent aussi les sénateurs qui l'ont élu à la présidence de leur groupe. La moindre des convenances aurait consisté à remettre sa démission de président de groupe devant ses pairs et en parler avec eux. Le silence de l'un, le silence de tous les autres valent donc signature d'un chèque en blanc. Le président du Sénat a eu bien tort de créer un comité de déontologie parlementaire car ce ne sont pas des usages de la supposée « profession » des sénateurs dont il faut débattre mais de leur morale et de leur conduite, dans et hors du Parlement, au sein d'une vraie instance qui n'aurait pour nom que celui de comité d'éthique.

Denys Pouillard
Directeur de l'observatoire de la vie politique et parlementaire