Ni un grand crû ni de la piquette, le dernier film de Woody Allen «You Will Meet a Tall Dark Stranger se laisse regarder avec un large sourire aux lèvres, conscient que dans son cas, la répétition a toujours très bon goût. Rien pour élargir son bassin d'auditeurs, mais ses fidèles passeront un bon moment.
En Grande-Bretagne, comme à New York ou à Barcelone, l'être humain est souvent confronté à suivre ses pulsions ou écouter sa raison. Alfie (Anthony Hopkins) a décidé de choisir la première option pour aller vivre avec une jeune prostituée (Lucy Punch), laissant sa femme Helena (Gemma Jones) éplorée, prêtre à croire n'importe quelle diseuse de bonne aventure. Leur fille Sally (Naomi Watts) cache un désir de plus en plus évident envers son patron (Antonio Banderas), alors que son mari Roy (Josh Brolin) cherche l'inspiration à son bouquin en s'intéressant à sa jolie voisine (Freida Pinto) d'en face. Il va sans dire que les astres annoncent des changements.
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Pendant que Francis Ford Coppola perd son temps dans des productions prétentieuses et que Martin Scorsese accepte à peu près n'importe quel projet, Woody Allen continue à être un des cinéastes les plus réguliers, accouchant toujours de son film à chaque année. Peut-être qu'il ne change guère sa réalisation, qu'il a tendance à toujours commencer avec une narration omnisciente et que ses thèmes fétiches se répètent ad nauseam, la qualité est généralement de la partie, hormis quelques écarts au début du 21e siècle.
Dernièrement il s'est concentré à explorer un seul genre par long métrage, que ce soit le drame («Cassandra's Dream»), la romance («Vicky Christina Barcelona») et la comédie («Whatever Works»). «You Will Meet a Tall Dark Stranger» célèbre l'union de ces trois axes (de prédilection) avec un certain succès. Les répliques caustiques ne manquent pas, le désir devient palpable et une certaine mélancolie se dégage de relations vouées irrémédiablement à l'échec ou des déceptions encoures.
Il est clair toutefois que le cinéaste aurait pu aller encore plus loin, offrir une vraie étude de personnages comme il le faisait à l'époque de «Crimes and Misdemeanors» ou même de «Deconstructing Harry» au lieu de tourner autour du pot. Il a beau butiné comme une abeille sur des sujets qui lui tiennent à coeur (la souffrance dans la création, la nécessité d'avoir une muse, le désir inconscient d'un homme envers une femme plus jeune), l'émotion se fait toujours attendre.
À l'image de la splendide Palme d'Or «Uncle Boonmee» d'Apichatpong Weerasethakul qui prendra bientôt l'affiche, ce nouvel essai du réalisateur à lunettes se veut spirituel dans son approche presque métaphysique de l'existence. Bien qu'on y traite de réincarnation et de vies antérieures, c'est pour mieux accentuer les choix qui s'offrent aux individus. Étrangement, une certaine morale rétrograde englobe cette théorie que l'herbe est toujours plus verte chez les voisins. Ainsi, ceux et celles qui sacrifient leurs avoirs vivront plus de déceptions que les gens qui subissent les actions, comme quoi le jeu n'en vaut pas toujours la chandelle...
Bien entendu le créateur du mythique «Annie Hall» ne cherche rien d'autre qu'à offrir un agréable divertissement, ce qu'il réussit haut la main. Dommage que malgré ses bons moments, ses nombreux rires procurés et la qualité de sa distribution, «You Will Meet a Tall Dark Stranger» semble finalement un peu inabouti, et qu'il risque de s'oublier aussi rapidement que «Scoop» et «Melinda and Melinda». Un Woody gentil sans plus demeura toutefois un plaisir coupable pour les cinéphiles qui n'ont presque plus de bonnes comédies légères à se mettre sous la dent.