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L'essentiel de la doctrine cathare (XI-XIIIe Siècle)

Bernard Délicieux, l'agitateur du Languedoc est l'un des plus acharnés opposants à l'inquisition. Les cathares ne craignent pas le bûcher et croient en la résurrection. L'esprit créé par le Dieu du bien, ne meurt pas et se réincarne. Les esprits vont de tunique en tunique jusqu'à en trouver une. Chaque âme peut connaître neuf corps. A la dernière incarnation (la neuvième) ou bien l'issue sera celle d'un bon chrétien avec passage au paradis ou bien chute en enfer.

On définit les cathares comme des chrétiens dualistes. Ils n'avaient pas de lieu de culte, peu de sacrements et niaient l'eucharistie. On définit cette église hérétique comme un christianisme médiéval dans lequel, le clergé, les bons-hommes rejetaient le Pape de Rome, symbole du mal qui persécute et excommunie.

L'incarnation du Christ

L'essentiel de la différence avec les catholiques réside dans le refus de l'incarnation du Christ, de sa réalité charnelle, de sa passion et de sa résurrection en quelque sorte "matérielle". En essayant de traduire la relation concrète de ces événements par le concept de "bonne nouvelle", les cathares ne font que déplacer le problème sur le plan "symbolique". Si l'enseignement et les rites de l'église catholique reposent sur le sacrifice rédempteur de Jésus, les Cathares lisent autrement les écritures et pour eux le Christ est venu délivrer un message, offrir aux hommes la clef de leur salut. De nature divine il ne s'est pas incarné mais n'a pris que l'apparence humaine. Dieu n'aurait pas permis qu'il subît l'affreux supplice de la croix. Les tortionnaires du Golgotha n'ont crucifié qu'une ombre. Il n'y a donc pas eu rédemption mais appel. Jésus est venu tirer les âmes déchues de leur sommeil et leur proposer un modèle de vie. Il a attisé les étincelles divines enfouies dans le corps de chacun. La fin du monde ne sera pas catastrophique mais aura lieu progressivement avec le départ des âmes sauvées ; Satan restant seul dans son néant.

Une réponse au problème du mal

Les bons-hommes cherchent à donner une réponse au problème majeur de la théologie chrétienne : l'existence du mal. Impossible pour eux de croire que le Dieu chrétien soit à l'origine du mal et ils refusent la solution catholique du libre arbitre, supposant une intention maligne de Dieu qui laisseraient ses créatures choisir entre le bien et le mal. Puisque Dieu est parfait et qu'il est le créateur de toute chose, comment a-t-il pu créer le mal ? Pour certains dualistes dit mitigés, le Dieu bon est supérieur au Dieu mauvais et le mal n'est que la création d'un ange rebelle, déchu, tombé du ciel, Lucifer (voir l'excellent livre de D'Ormesson, l'archange Gabriel). Lucifer est le seul auteur de la création du mal. Pour d'autres, les dualistes absolus, le bien et le mal sont sur le même pied d'égalité et c'est la réalité seulement qui est une création satanique. Les hommes qui peuplent la terre sont donc des damnés qui se reproduisent. Cette deuxième conception se retrouve chez les cathares qui dénonceront la procréation pour obtenir l'extinction du monde. Les cathares furent considérés comme des manichéens à cause de leur credo dualiste.

Le salut

En persécutant et excommuniant, l'église catholique est complice et productrice de mal. La doctrine cathare est finalement plus optimiste que l'église romaine qui juge qu'un enfer éternel attend les pécheurs. L'église des bons-hommes croit au salut des âmes, assuré pour chacun, qui se purifie au fil de ses vies successives.

Dissidents plutôt qu'hérétiques

Les cathares sont incontestablement des chrétiens mais des chrétiens dissidents, critiques. S'ils ne vénèrent pas la croix, s'ils prêchent, par l'exemple, la pratique des préceptes évangéliques, s'ils refusent des sacrements catholiques, les cathares reprennent des éléments de la théologie dominante et font constamment référence à des écritures reconnues par l'église romaine : les Évangiles. Les causes de leur persécution sont peut-être à rechercher ailleurs que dans leur doctrine.

Le régime féodal des seigneurs

On ne peut comprendre le déroulement des événements si on ne connaît pas les mécanismes et les éléments fondamentaux des XII-XIIIe. Le système féodal définit des obligations de service et d'obéissance d'un vassal envers son suzerain. Les droits du seigneur sont de deux ordres, sur le sol et banal, sur les gens. La seigneurie se compose de la réserve que le seigneur exploite en gestion directe et des tenures concédées à des paysans, les tenanciers. Le droit banal est le pouvoir de lever l'impôt, la taille, de juger et de punir. Des liens vassaliques compliqués ne facilitent pas les choses car le sol d'une tenure peut dépendre d'un seigneur et le droit banal d'un autre. Les seigneurs construisent désormais leurs châteaux en pierre, alors que jusque l'an 1000, ils les construisaient en bois.

L'église

Encore un petit effort, cher lecteur, pour bien comprendre la mentalité d'un homme ou d'une femme vivant en ce début du XIIIe. L'église et la religion ont un rôle important. On a peine à se rendre compte aujourd'hui du poids qu'avait à l'époque la papauté en matière politique. La vie est rythmée par les fêtes religieuses et c'est le curé qui fait part aux habitants des décision de l'évêque mais aussi de celles du seigneur. L'acteur principal est donc le Pape. La papauté s'est dotée d'une doctrine, la théocratie, en vertu de laquelle elle estime détenir la souveraineté des affaires temporelles. La papauté peut ne pas exercer directement l'autorité politique, à condition que celui qui l'assume la reçoive de la papauté et soit contrôlée par elle. En ce début de XIIIe siècle les conditions politiques sont favorables au Saint-Siège qui contrôle la vie politique dans plusieurs états catholiques et se place désormais en suzerain naturel de tous les pays catholiques. L'église peut compter sur son clergé mais aussi sur de nombreux ordres religieux.


Les données politiques

la tragédie cathare ne peut se réduire à son seul aspect religieux, il y a aussi le système féodal. Le comté de Toulouse, compte tenu de son importance, est au cœur des événements. Le comte de Toulouse qui est en plus duc de Narbonne, marquis de Provence est avant tout un vassal du roi de France, mais aussi du roi d'Angleterre, de celui d'Aragon et d'Allemagne car Arles fait partie du domaine impérial germanique.

Contre l'église et les seigneurs

Si l'hérésie cathare progresse aussi rapidement aux XI-XIIe siècle, on le doit principalement à un mouvement de révolte contre les avantages des seigneurs et du clergé. C'est donc, au départ, un sursaut contre une religion et une société dominante aux nombreux privilèges, qui sera le détonateur du mouvement. De plus, les châtelains devenus seigneurs tels ceux de Termes ou ceux de Peyrepertuse qui n'hésitent pas à utiliser la violence et la rapine pour s'approprier souvent illégalement les terres des abbayes exaspèrent.

Cathare contre féodalité

La hiérarchie sociale justifiée comme une création divine est perçue comme une in,justice, une création du mal et n'apparaît pas comme le reflet d'une volonté de Dieu. La naissance, donc le sang qui fonde la distinction sociale ne peut être qu'une invention satanique. Les cathares vont s'infiltrer dans ce mécontentement et condamneront le pilier de la féodalité qui est le serment fait par tout seigneur et son vassal.

Soutien des seigneurs

Mais le catharisme, après un démarrage plutôt populaire va curieusement se développer auprès de la noblesse que les cathares vilipendent. En effet, les seigneurs ne sont pas fâchés de voir les cathares s'attaquer à l'église dont elle convoite les immense domaines. La noblesse va donc soutenir ouvertement ses sujets qui supportent, de moins en moins, l'impôt du clergé, la dîme.

Le traité de Paris 1229
Le traité de Paris plaçait évidemment les autorités religieuses dans une position de force pour extirper l'hérésie cathare. Très vite, à partir ce cette époque, on assiste à l'exécution des fidèles cathares. Montségur, vassal du comté de Foix, se trouve à l'Est de Foix et au Sud-Ouest de Carcassonne dans le pays d'Olmes. Ce site est indissociable de Simon de Péreille qui en 1204 restaura l'une se ses dépendances.
Montségur refuge de faydits
C'est à Montségur que de nombreux Faydits, seigneurs sans fief, dépossédés pour la plupart par Simon de Montfort entre 1209 et 1210 viendront s'y retrancher. Le concile de Latran de 1215 mentionne déjà Montségur comme le repère des hérétiques cathares. De nombreux croyants se rendent, en effet, à Montségur pour y recevoir le consolement.
L'assassinat d'Avignonet
Le 28 avril 1242 deux inquisiteurs qui passent la nuit à Avignonet au Nord-Ouest de Castelnaudary sont massacrés par des chevaliers faydits descendus, dans cette intention, de Montségur.
La réaction des croisés
La réaction des croisés sera immédiate mais elle se heurtera à une solide résistance. Le siège va durer 9 mois. Les combattants à Montségur ne sont à peine qu'une centaine d'homme mais ils bénéficient de l'appui des populations voisines qui les approvisionnent depuis Péreille ou Fanjeau. Les croisés ne peuvent installer de catapultes dans ce relief très incliné et inaccessible. En novembre les forces royales réussissent à installer une catapulte sur une terrasse. Tout va s'accélérer à la fin de l'hiver et en février 1244, après 9 mois de siège, Montségur de décide à capituler après avoir obtenu un sursis de 15 jours pour permettre à chacun de réfléchir et d'abjurer sa foi cathare. C'est pendant ce sursis que trois ou quatre parfaits s'échapperont avec le trésor qui n'a jamais été localisé. 210 à 215 personnes qui refuseront d'abdiquer leur foi seront brûlées vivantes le 16 mars 1244.


L'après Montségur

Le bûcher de Montségur n'aura pas réussi à faire disparaître le catharisme et d'autres refuges résisteront, à l'exemple de Quéribus qui sera finalement pris en 1255. La victoire finale sera toutefois du côté catholique. Après la mort en 1247, de Raymond VII, comte de Toulouse sans héritier et de sa fille Jeanne mariée à Alphonse de Poitiers, le comté de Toulouse revient en 1271 au roi de France. Plusieurs continuateurs de la pensée cathare, parfois revenus d'Italie où ils s'étaient exilés, essaieront bien de réveiller les consciences comme Pierre Authié aidé de son frère Guilhem mais ces derniers finiront par être arrêtés en 1309 et exécutés en 1310. C'en est fini cette foi du catharisme.

Le dernier cathare

C'est devant le château de Villerouge-Termenes que périt le dernier cathare Guilhem Bélibaste. C'est un homme singulier, né vers 1280, qui avait tué en 1305 un berger considéré comme un dénonciateur de l'inquisition. Notre cathare, devenu parfait, s'installa comme artisan dans la province de Teruel mais s'étant marié, il perdit la qualité de parfait pour avoir violé l'obligation de chasteté. Cela ne l'empêcha pas d'être arrêté, mais comme il refusa d'abjurer la foi cathare, il fut brûlé vif.

Le trésor des cathares

Après la chute de Montségur, les vagues de l'exil italien s'amplifièrent. Durant le siège de Montségur une correspondance est attestée avec Crémone en Italie. C'est probablement vers cette destination que le trésor des cathares a convergé. L'Italie accueillera de nombreux faydits, bons hommes traqués ou simples croyants. Mais ces émigrés occitans vivaient mal leur exil, revenaient et se faisaient prendre. Cunéo à la frontière franco-italienne a constitué une plaque tournante importante dans cette émigration. Mais l'inquisition italienne ne leur laissa pas plus de répit. Des rafles eurent lieu à Sirmione sur le lac de Garde dans lesquelles furent arrêtés français et italiens. Comme à Montségur, le 12 février 1278, 200 bonshommes monteront également sur le bûcher.

LA LUTTE CONTRE LES CATHARES

Il faudra 50 ans pour venir à bout de l'hérésie cathare. Tout commence en 1204 lorsque le pape Innocent III envoie trois légat prêcher contre les albigeois. Quatre ans plus tard l'assassinat de l'un d'eux déclenche la première croisade sous le commandement de Simon de Montfort. La guerre sainte va durer 20 ans. Mais si les citadelles tombent, l'hérésie n'est pas vaincue. En 1226 une seconde croisade commence avec à sa tête le roi de France en personne. Mais l'hérésie résiste et c'est l'inquisition qui prend les choses en main et est confiée aux dominicains. Les derniers albigeois tentent de résister dans des forteresses inaccessibles, Montségur, Puilaurens, Quéribus. La guerre albigeoise se termine en 1255 avec la prise de Quéribus, dernier bastion du catharisme.