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«Je n’avais aucun doute que Floyd Landis était dopé»

DOPAGE | Martial Saugy, le directeur du Laboratoire antidopage de Lausanne n’est pas surpris par les aveux du coureur américain qui avait mis en cause la fiabilité des analyses.

Patrick Testuz | 22.05.2010 | 00:01

La répétition des affaires a causé un dommage considérable au cyclisme. Les protagonistes de ce sport en ont pris conscience. Les mentalités ont évolué. Ce discours - entendu - prévaut dans le monde de la petite reine. Et voilà que les révélations fracassantes de Floyd Landis agitent une fois encore le landerneau, et sèment un peu plus le trouble dans les esprits.

«Ce serait surprenant si j’étais… surpris par cet aveu. Je connais bien le dossier. Je n’avais aucun doute que Landis était dopé. Quelques années (ndlr: le coureur américain a été contrôlé positif sur le Tour 2006) et millions de dollars de frais de procédure plus tard, la sentence est rendue.» Ainsi s’exprime Martial Saugy, le directeur du labora-toire antidopage de Lausanne. «Quant à ses accusations, je lui en laisse l’entière responsabilité. Je ne peux pas étayer ses dires. D’autant qu’au labo, on travaille toujours sur des numéros et des noms de code pour préserver l’anonymat.»

Notre interlocuteur laisse son esprit vagabonder avant d’ajouter: «Long et coûteux, ce verdict fait penser à un énorme gâchis. Il souligne la lourdeur de l’appareil. Toute la chaîne antidopage devrait être simplifiée. Sans compter que cette incroyable énergie déployée aurait pu être réduite à néant, en amont, par un vice de forme scientifique ou juridique.»

Les révélations de Landis, qui dit par ailleurs ne pas posséder de preuves tangibles, sont-elles plausibles? «D’un point de vue technique, oui. Dès l’étude de son cas, on a décelé le recours aux patches de testostérone. Maintenant, ses descriptions un peu surréalistes et les conversations qu’il rapporte n’engagent que lui.»

La lutte continue
Landis dit s’être dopé l’essentiel de sa carrière. Cet aveu suggère que le mal est profond et amène à s’interroger sur l’utilité de la lutte. Martial Saugy en convient («C’est parfois décourageant») mais refuse d’abdiquer. «On ne va pas éradiquer le dopage, c’est sûr. L’effet dissuasif du passeport biologique produit pourtant ses effets. Il oblige les tricheurs à choisir un régime plus doux (patches de testostérone, microdoses d’EPO). Rien à voir avec le dopage des années nonante. Au vrai, toute forme de dopage affecte la machine biologique de l’être humain et est susceptible d’être détectée. Les investissements et les sacrifices valent donc la peine d’être poursuivis. L’utilité des contrôles ne doit pas être mise en cause par cette déclaration. Au-delà de l’athlète, il faudrait s’intéresser à son entourage et se poser la question: à qui profite le crime?»

Landis, comme d’autres avant et après lui, a mis en cause la fiabilité du laboratoire français chargé des analyses. «Dès qu’un sportif est déclaré positif, on nous met la pression. Au tribunal, c’est nous, les technocrates des labos, les méchants. On brise des carrières, on détruit des vies. Ça fait partie du jeu des avocats. Des fois ça va loin. En vingt ans d’activité, je n’ai en revanche jamais fait l’objet d’une tentative de corruption. Personne ne m’a proposé d’enveloppe.»

Le sport, lui, n’est pas près de s’affranchir de ses maux.