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Éducation - La formidable réussite scolaire des enfants d'Asiatiques Par Cécilia Gabizon

Une étude de l'Ined montre également que les filles d'immigrés obtiennent de meilleures performances que leurs frères. 

Dis-moi qui sont tes parents, je prédirai ton destin, semble dire l'enquête Trajectoire et Origines (TEO), qui s'appuie sur un large échantillon d'immigrés et d'enfants d'immigrés. Les statistiques présentées ce mardi par l'Ined sont implacables. Les enfants d'Asiatiques connaissent une éclatante réussite scolaire. La moitié des femmes descendantes d'Asiatiques (entre 18 et 50 ans) sont diplômées du supérieur contre 37% pour l'ensemble des Françaises. Les hommes survolent également les classements, avec près de 47% de diplômés du supérieur.

Aux États-Unis, les chercheurs analysent les performances des Sino-Américains depuis des années. La culture d'origine, la valorisation de la réussite, notamment financière, ou encore la calligraphie semblent contribuer à leur rayonnement, selon Peter Kwong, professeur à l'université de Hunter, à New York. En France, les démographes se penchent tout juste sur la réussite des enfants de Vietnamiens, Laotiens, Cambodgiens, de Chinois… Ils semblent échapper au déclassement souvent subi par leurs parents.

Car la migration a son cycle, observé dans tous les pays: la première génération peine à valoriser ses diplômes, perd en statut social. Les enfants rattrapent la société d'accueil. La troisième génération émerge vraiment. 

Si les descendants d'Asiatiques brûlent les étapes, le sort des enfants de Maghrébins, d'Africains ou de Turcs est plus contrasté. Les femmes s'en sortent bien. L'enquête Trajectoire et Origines (TEO) confirme ce que l'on pressentait. Les filles de Maghrébines et d'Africaines inversent «les rapports de genre dans l'accès aux niveaux d'instruction les plus élevés», affirment les chercheurs de l'Ined qui conduisent cette enquête depuis deux ans. «Plus surveillées, plus encouragées peut-être, elles misent clairement sur l'école et bénéficient aussi de l'indulgence des professeurs», avance Cris Beauchemin. Un tiers des filles d'origine africaine obtiennent un diplôme du supérieur, comme les autres Françaises. Elles trouvent ensuite plus facilement du travail que leurs frères, avec des salaires comparables à ceux de la population majoritaire.

Dans cette percée féminine, les descendantes d'Algériens semblent en retrait. Tandis que les filles de Turcs font l'exception: elles sont rarement diplômées et se trouvent pratiquement absentes du marché du travail. «Le poids de la famille et des interdits pèse. Les allées et venues sont surveillées», souligne Gaye Petek, spécialiste de la communauté turque.

Quelle que soit leur origine, le sort des garçons s'avère cruel. Ils ont beau rêver de diplômes prestigieux, s'investir plus que leurs voisins de quartier pour gagner l'université, ils connaissent l'amertume des promesses non tenues. Souvent fils d'ouvriers, ils sont pénalisés dans le système scolaire et massivement orientés vers des voies d'apprentissage. À milieu social équivalent, ils sont plus nombreux à poursuivre leurs études. Mais le diplôme supérieur en main, ils se trouvent deux fois plus au chômage que les autres Français. Lorsqu'ils sont embauchés, ils sont sous-payés, affirme l'étude. Ces discriminations s'estompent en partie, lorsque l'on compare à poste égal, à secteur égal… «Mais un fils d'Africain sera payé 10% de moins, toute chose égale par ailleurs, qu'un enfant de Français venu du même quartier», souligne Cris Beauchemin.

«Fuite des cerveaux»

L'enquête TEO révèle aussi le nouveau profil des immigrés. Parmi les vagues d'immigration arrivées avant 1974, 11% des hommes avaient un diplôme du supérieur. Désormais, ils sont 29%. Les Africains sont particulièrement lettrés. «La fuite des cerveaux existe. Ils sont chez nous», assure Cris Beauchemin, pressé de faire évoluer le regard sur ces immigrés. Sans insister, l'enquête montre des employeurs souvent plus ouverts à ces nouveaux venus qu'aux enfants d'immigrés.