Citation du jour:

N'oubliez pas de faire un don. Nous avons besoin de votre aide en ces temps difficiles.Faire un don.

Sciences (médecine) - Le métagénome de nos intestins révélé

Vu de microbe, l'être humain est un abri où peuvent vivre et propérer plus dix fois plus de bactéries que de cellules humaines. La majeure partie de ces bactéries vivent dans nos intestins. Elles demeuraient mystérieuses. Elles le sont moins depuis ce matin, car la revue Nature publie l'analyse de leurs génomes.

Ces millions de bactéries sont vitales : elles synthétisent des vitamines, contribuent à la dégradation de molécules que nous serions incapables d'assimiler directement, jouent un grand rôle dans les fonctions immunitaires en nous protégeant contre les bactéries pathogènes. Un rôle positif, mais aussi négatif : des différences significatives dans la composition du métagénome - le génome des bactéries que nous hébergeons - chez les personnes obèses ou atteintes de maladies inflammatoires intestinales et les sujets sains, montrent que des déséquilibres de la flore digestive peuvent contribuer au développement de maladies.

Cependant, contrairement au génome humain, intégralement séquencé, le contenu génomique de ces communautés bactériennes était jusqu’à ce jour largement inconnu. Vivant sans oxygène, à l'abri de nos intestins, dans un environnement difficile à caractériser et à reproduire, la plupart des bactéries ne peuvent pas être cultivées en laboratoire. Pour paller cette difficulté, un consortium international, auquel participe le Génoscope d'Evry, a analysé le génome des bactéries présentes dans les selles de 124 personnes, européennes.

Ce programme, baptisé MetaHIT (METAgenomics of the Human Intestinal Tract)), a été lancé en 2008. Voir ici l'annonce par la PDG de l'INRA Marion Guillou. L'INRA ? Logique, car c'est cet institut qui a coordonné la recherche de 12 organismes européens de recherche et d'industriels (Danone, Mérieux) et de l'Institut de génomique de Pékin à Shenzen, avec un financement européen de 11,4 millions d'euros, la moitié du coût total. Les équipes françaises de la recherche publique, INRA, Génoscope (CEA) et industrielles ont joué un rôle important, mais celui de l'équipe chinoise est souligné par la mise en premier signataire de l'article de Nature (ici en pdf) de l'un de ses membres, Junjie Qin, même si l'équipe précise que "tous les signataires ont contribué à égalité".

Une méthode de séquençage d’ADN de nouvelle génération, à très haut débit, à été mise en œuvre, permettant d’analyser la totalité de l’ADN extrait des selles et d'accéder ainsi aux espèces bactériennes qui ne peuvent pas être cultivées. Deux cent fois plus de données de séquences d’ADN que dans toute autre étude du métagénome intestinal humain ont été produites et analysées.

Les biologistes estiment que 85% des gènes bactériens portés par la population humaine étudiée ont ainsi été séquencés ; soit environ 3,3 millions de gènes bactériens. Ce métagénome est donc 150 fois plus important que le génome humain. 536 000 sont retrouvés chez chaque individu. Environ 40 % de ces gènes sont présents chez au moins un individu sur deux. Ce résultat permet d'analyser la majorité des fonctions biologiques de ces bactéries à travers leurs génomes

Les hommes sont assez peu différents du point de vue microbien. L’analyse plus fine du métagénome a permis de déduire que les gènes séquencés proviennent d'un millier d'espèces bactériennes intestinales. Au moins 170 de ces espèces sont abritées par chaque individu et au moins 75 sont présentes chez plus d’un individu sur deux.