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Littérature Africaine - Critique du livre "Le vieux nègre et la médaille" de Ferdinand Oyono

Source: critiqueslibres.com
COMIQUE, MAIS REALISTE!

Nous sommes au Cameroun peu après la Deuxième Guerre Mondiale, Meka, un autochtone converti au Christianisme, est convoqué par l’administration coloniale Française dans le «quartier blanc». Il craint le pire, mais finalement reçoit une bonne nouvelle, l’occupant va lui remettre une médaille honorifique, à l’occasion du 14 juillet.

Ferdinand Oyono - AGRANDIR
Commencent alors les préparatifs pour ce qui s’avère être pour lui la journée la plus importante de sa vie. Le vieil homme du village de Doum, s’affaire donc, achat de chaussures, d’une veste, visite de la famille et d’amis venus de tous les villages avoisinants…

Malheureusement, le jour de la cérémonie, rien ne se déroule comme prévu pour Meka et les siens. Non seulement le représentant des blancs arrive en retard à la cérémonie, mais en plus, le vin d’honneur donné au «Foyer Africain» tourne à la beuverie générale…

Ce court (trop court) roman d’une style drôle, intelligent et avec une écriture peu commune, faisant la part belle à l’argot des autochtones, développe le thème déjà largement traité du colonialisme et du contraste noir et blanc. L’auteur nous livre ici, un livre unique, avec une grande verve comique, soutenue par un réalisme intense. Certaines scènes sont en effet d’une bouffonnerie et d’un comique sans égal, et on rit de bon cœur à tous les «malheurs» qui accablent le vieil homme.

N’oublions pas toutefois le côté tragique de toute l’histoire, car voici un homme récompensé d’une médaille, pour avoir perdu tout ce qu’il possédait, ses terres cédées à l’Église, ses deux fils, morts à la guerre pour satisfaire l’autorité occupante. Personnage de farce, bien malgré lui, le vieux nègre ne représente en fait, pour les autorités d’occupation et pour l'Église, qu’un modèle de soumission…

Un livre qui tout en nous faisant suivre l’histoire de son personnage principal, le vieux nègre, nous invite à la réflexion, tout en riant des situations cocasses, et met à nu les contradictions entre les paroles et le comportement réel des Blancs… Ces Blancs, qui malgré des paroles et des discours flatteurs ne se mêlent jamais à la masse du peuple qu'ils dirigent….

Véritable auteur culte au milieu des années 80, aujourd’hui tombé en désuétude, ancien ambassadeur du Cameroun à Paris, ancien ministre de la Culture, véritable monument de la littérature francophone en Afrique, Ferdinand OYONO, s’est éteint en juin 2010, à l’âge de quatre-vingt un ans, nous laissant une œuvre riche et variée. Dont ce beau et précieux roman mérite d’être lu, ne fut-ce que pour redécouvrir cet auteur qui le mérite!