Source: Wikipédia
Le bonheur est un état durable de plénitude et de satisfaction, état agréable et équilibré de l'esprit et du corps, d'où la souffrance, le stress, l'inquiétude et le trouble sont absents.
Étymologiquement vient de l'expression « bon urû ».
Eür est issu du latin augurium qui signifie « accroissement accordé par les dieux à une entreprise ». Ce mot latin est lui-même issu d'une racine indo-européenne (reconstituée) aweg, dont les autres principaux représentants en latin sont :
Toute l'Éthique de Spinoza est une explication de la voie philosophique par laquelle l'homme peut se libérer de la souffrance due aux passions et à vivre avec toujours plus de bonheur en comprenant sa vraie nature par l'usage de la raison. Comme chez les grecs, épicuriens et stoïciens, le bonheur est inséparable de la vertu : "bien agir et être dans la joie". Etre heureux, c'est ressentir la joie de vivre dans la force d'âme, avec courage et générosité, en réalisant ses désirs raisonnables dans un sentiment de liberté intérieure que les passions ne peuvent troubler.
A l'extrême de la libération des passions par la connaissance de la vérité, qui est la compréhension intuitive que tout ce qui existe est en réalité Dieu, c'est-à-dire la nature, le bonheur devient parfait et prend le nom de béatitude, c'est-à-dire joie vécue avec un sentiment d'éternité et s'accompagnant d'un amour de toute chose.
« Le concept de bonheur n’est pas un concept que l’homme abstrait de ses instincts et qu’il extrait en lui-même de son animalité, mais c’est une simple Idée d’un état, à laquelle il veut rendre adéquat cet état sous des conditions simplement empiriques (ce qui est impossible) » [1]
Kant ne voit donc pas que le bonheur n'est pas une "simple idée" mais bien la réalité d'un sentiment que la conscience reconnait spontanément comme joie accompagnée de plénitude.
De même il pense, à tort, que le bonheur supposerait que nous puissions satisfaire tous nos désirs, pleinement et sans interruption :
« Le bonheur est la satisfaction de toutes nos inclinations (tant extensive, quant à leur variété, qu’intensive, quant au degré, et aussi protensive, quant à la durée) » [2] . … évidemment ce programme est irréalisable ! Mais le bonheur ne demande en réalité que de satisfaire nos besoins, c'est-à-dire nos seuls désirs naturels et nécessaires.
Chacun, sous l’impulsion de sa nature, est cependant porté à rechercher son propre bonheur. Mais du fait de l’irréalisme du contenu du concept, quiconque veut se donner comme impératif dans la vie de se consacrer effectivement à cette recherche sera bien embarrassé :
« Le concept de bonheur est un concept si indéterminé, que, malgré le désir qu’a tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et veut. La raison en est que tous les éléments qui font partie du concept de bonheur sont dans leur ensemble empiriques, c’est-à-dire doivent être empruntés à l’expérience, et que cependant pour l’idée du bonheur, un tout absolu, un maximum de bien-être dans mon état présent et dans toute ma condition future est nécessaire. Or il est impossible qu’un être fini si perspicace et en même temps si puissant qu’on le suppose se fasse un concept déterminé de ce qu’il veut véritablement. .. Richesse ? ….Connaissances ? … Longue vie ? .. Santé ? … Il n’y a donc pas à cet égard d’impératif qui puisse commander au sens strict du mot de faire ce qui rend heureux, par ce que le bonheur est un idéal non de la raison mais de l’imagination. » [3]
Tout cela n’empêche pas bien sûr que chacun ait pour premier mouvement naturel de se mettre à la poursuite de son bonheur propre, et que beaucoup parviennent à le trouver et à le comprendre de manière tout à fait déterminée !
Kant est en fait un moraliste qui veut critiquer l'idée - et la recherche - de bonheur pour y substituer la suprématie du devoir.
« Il n’y a qu’un impératif catégorique et c’est celui-ci : Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu puisses vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle. » [4]
Leur nature propre pousse les hommes à rechercher chacun son propre bonheur, mais cela ne correspond pas à l’essence du devoir moral :
« Le devoir doit être une nécessité pratique inconditionnée de l'action : il doit donc valoir pour tous les êtres raisonnables (les seuls auxquels peut s'appliquer absolument un impératif) et c'est seulement à ce titre qu'il est aussi une loi pour toute volonté humaine. Au contraire, ce qui est dérivé de la nature propre de l'humanité, ce qui est dérivé de certains sentiments et de certains penchants et même, si c'était possible, d'une direction qui serait particulière à la raison humaine et ne devrait pas nécessairement valoir pour la volonté de tout être raisonnable, tout cela peut bien nous fournir une maxime à notre usage mais non une loi...non un principe objectif d'après lequel nous aurions l'ordre d'agir, alors même que tous nos penchants, nos inclinations et les dispositions de notre nature y seraient contraires. » [5]
Poursuivre son propre bonheur n’est donc pas un devoir, c’est un point sur lequel Kant revient très souvent. La dissociation rigoureuse entre devoir et recherche du bonheur repose d’abord sur un argument purement logique :
« Le bonheur personnel est en effet une fin qu'ont certes tous les hommes (en raison de l'impulsion de leur nature) mais cette fin ne peut jamais être envisagée comme un devoir sans que l'on se contredise. Ce que chacun inévitablement veut déjà de soi-même, cela n'appartient pas au concept de devoir.. Il est contradictoire de dire qu'on est obligé de concourir de toutes ses forces à son propre bonheur. » [6]
A cela s’ajoute un obstacle pratique, c’est que les attentes et les désirs des uns et des autres étant contradictoires, si chacun ne recherchait que son propre bonheur, il en résulterait des conflits permanents, ce qui anéantirait toute chance de bonheur :
« Il est donc étrange, alors que le désir du bonheur est universel et par suite aussi la maxime en vertu de laquelle chacun pose ce désir comme principe déterminant de sa volonté, qu’il ait pu venir à l’esprit d’hommes sensés d’en faire pour cela une loi pratique universelle. En effet, alors que d’ordinaire une loi universelle de la nature fait que tout concorde, en ce cas, si l’on voulait attribuer à la maxime la généralité d’une loi, il s’en suivrait exactement le contraire même de l’accord, le pire des conflits et le complet anéantissement de la maxime elle-même et de sa fin…. Découvrir une loi régissant l’ensemble des inclinations tout en satisfaisant à la condition de les accorder complètement, voilà qui est parfaitement impossible. » [7]
Mais le fait qu’il souligne ces difficultés ne signifie pas que Kant soit un ennemi du bonheur. Au contraire, le devoir envers autrui consiste à contribuer à son bonheur :
« Que sont les fins qui sont en même temps des devoirs? Ce sont : ma perfection propre et le bonheur d'autrui. On ne peut pas intervertir les termes... Quand il est question d'un bonheur auquel ce doit être pour moi un devoir de travailler comme à ma fin, il s'agit nécessairement du bonheur d'autres hommes, de la fin (légitime) desquels je fais par là aussi ma propre fin. » [8]
Kant démontre que le devoir de travailler au bonheur d’autrui correspond bien au critère de l’impératif catégorique par le raisonnement suivant :
« Comme notre amour de nous-mêmes ne peut être séparé du besoin d’être aussi aimé par d’autres (et d’en être aidé en cas de danger), comme nous faisons ainsi de nous-mêmes une fin pour les autres et que cette maxime ne peut jamais obliger autrement que parce qu’elle est qualifiée pour former une loi universelle, par suite, par le biais de la volonté de faire aussi des autres une fin pour nous, le bonheur d’autrui est une fin qui est aussi un devoir. » [9]
Si donc le devoir envers soi-même consiste à travailler à sa perfection morale personnelle et non à rechercher son propre bonheur, la dite recherche n’est pas pour autant contraire à la morale, car elle peut contribuer à entretenir la moralité :
« L'adversité, la douleur, l'indigence sont de grandes tentations d'enfreindre son devoir ; l'aisance, la force, la santé et la prospérité en général, qui s'opposent à cette influence, peuvent donc aussi semble-t-il être regardées comme des fins qui sont en même temps des devoirs, à savoir celui de travailler à son propre bonheur et non pas seulement à celui d'autrui. Mais alors ce n'est pas le bonheur qui est la fin mais la moralité du sujet. » [10]
Parvenus à ce stade, nous voyons apparaître une question : si je dois travailler au bonheur d’autrui, mais que je peux aussi travailler au mien propre, comment répartir mes efforts entre ceux qui ont un but égoïste et ceux qui ont un but altruiste ? La réponse de Kant est à la fois imprécise et nuancée :
« Je dois faire aux autres le sacrifice d’une partie de mon bien-être sans espérer de compensation, parce que c’est un devoir, mais il est impossible de déterminer avec précision jusqu’à quelles limites cela peut aller. Il importe beaucoup de savoir ce qui est vraiment un besoin pour chacun suivant sa manière de sentir, et il faut laisser à chacun le soin de le déterminer par lui-même. En effet, exiger le sacrifice de son propre bonheur, de ses vrais besoins, deviendrait une maxime contradictoire en soi si on l’érigeait en loi universelle. Ainsi ce devoir n’est qu’un devoir large, il offre la latitude de faire plus ou moins sans qu’il soit possible d’en indiquer précisément les limites. La loi vaut seulement pour les maximes, non pour les actions déterminées. » [11]
Cependant il ne peut pas tout à fait abandonner l'exigence du bonheur...
« L’homme pensant, lorsqu’il a triomphé de l’incitation au vice et qu’il est conscient d’avoir accompli son devoir souvent amer, se trouve dans un état de paix intérieure et de contentement que l’on peut très bien appeler bonheur, où la vertu est à elle-même sa propre gratification. ….Cependant il est clair que, puisqu’il ne peut se promettre cette gratification de la vertu que de la conscience d’avoir fait son devoir, celle qu’on nomme en dernier doit pourtant venir en premier ; c’est-à-dire qu’il doit se trouver obligé de faire son devoir avant même et sans même qu’il pense que le bonheur sera la conséquence de l’observation du devoir. » [12]
Mais le contentement dont il est ici question ne constitue pas un bonheur complet et, dans le monde tel qu’il est, on ne peut espérer que le bonheur de chacun soit proportionné à sa vertu :
« Le bonheur est l’état dans le monde d’un être raisonnable, pour qui, dans toute son existence, tout va selon son désir et sa volonté, et il repose par conséquent sur l’accord de la nature avec le but tout entier poursuivi par cet être, de même qu’avec le principe déterminant essentiel de sa volonté. Or la loi morale, comme loi de la liberté, ordonne par des principes déterminants qui doivent être tout à fait indépendants de la nature et de l’accord de celle-ci avec notre faculté de désirer (comme mobiles) ; d’un autre côté, l’être raisonnable qui agit dans le monde n’est assurément pas en même temps cause du monde et de la nature elle-même. Donc, dans la loi morale, il n’y a pas le moindre principe pour une connexion nécessaire entre la moralité et le bonheur proportionné d’un être qui, faisant partie du monde, en dépend, et qui justement pour cela ne peut, par sa volonté, être cause de cette nature et, pour ce qui est de son bonheur, la mettre par ses propres forces complètement d’accord avec ses principes pratiques. » [13]
Et pourtant, c’est la vertu qui rend digne d’être heureux, et « Pour que le bien soit complet, il faut que celui qui ne s’est pas conduit de façon à se rendre indigne du bonheur puisse espérer d’y participer. »
On se trouve ici devant l’antinomie de la raison pratique : Seule la pratique de la vertu fait mériter le bonheur, mais en fait, selon les mécanismes de la nature, rien ne garantit qu’elle l’obtienne effectivement. Pour résoudre cette antinomie, la raison pratique est conduite à postuler l’immortalité de l’âme et l’existence de Dieu. Celui-ci, dans l’au-delà de la mort, récompense la vertu par le bonheur.
Kant est ainsi un philosophe, non du bonheur, mais de la spéculation, de l'éthique et de la morale.
L'idée d'un pessimisme freudien est liée à la théorie d'une pulsion de mort. Sigmund Freud considère à partir de 1920 qu'à la sexualité psychique insatiable s'ajoute une tendance à l'autodestruction, à l'anéantissement. Si la psychanalyse des débuts présente un être frustré, blessé, éventuellement choqué par ses désirs sexuels, incapable qu'il est de se les avouer et les tolérer, la psychanalyse d'après 1920 propose donc une vue pessimiste dans laquelle le bonheur est définitivement inaccessible.
Le psychanalyste Jacques Lacan mit un soin particulier à étudier le manque : manque de l'autre, sous toutes ses formes ; si Lacan n'est pas particulièrement pessimiste, il a par contre formalisé cet aspect de l'étude de la vie psychique.
Des psychologues comme Reich, Jung, Perls, Fromm ou Maslow affirment au contraire que le bonheur est le sentiment naturel qu'éprouve la psyché humaine lorsqu'elle s'épanouit d'une manière intégrée, ce qui suppose une forme de culture fondée sur l'amour et l'être plutôt que sur la peur et l'avoir.
Selon Maddux (2002), c’est en mettant l’accent sur les « troubles mentaux » que l’idéologie de la maladie et le DSM ont influencé la conception du fonctionnement humain et de la psychologie clinique : que la psychologie clinique est devenue « pathologique »(p. 39) L’idéologie de la maladie a survécu à son utilité; il est temps de changer la vision qu’ont les psychologues cliniciens de leur discipline de même que le regard du public à son endroit. La psychologie positive offre la possibilité d’une réorientation de notre conception de la psychologie clinique, de la santé psychologique et de l’adaptation humaine. La psychologie positive rejette :
En Europe, la notion semble avoir été exprimée pour la première fois sous la Révolution française par Saint-Just avec sa célèbre phrase de 1794, "le bonheur est une idée neuve en Europe." [14].
L'idée de bonheur est revenue sur le devant de la scène politique dans les pays développés à la fin des années 1960, alors que la croissance économique, l'équipement des foyers, l'apparition de la société de loisirs semblait devoir répondre aux attentes de tous les citoyens. Un courant politique critique s'est développé autour de cette question, affirmant que la croissance économique et matérielle ne pouvait suffire à elle seule à apporter le bonheur. Un courant encore plus critique a développé l'idée que la société de consommation, en créant sans cesse de nouveaux désirs dès que les anciens étaient satisfaits, ne pouvait permettre l'accès au bonheur. La mouvance "soixante-huitarde" a ainsi cherché d'autres formes de bonheur, à travers les rencontres humaines, un mode de vie collectif, le retour à la nature, une vie plus simple et dégagée de contraintes, la pratique des arts, etc.
Cette notion d'un "autre bonheur", alternatif à celui proposé par la société de consommation et montré dans les images de publicité, s'est imposé depuis lors. Elle-même d'ailleurs parfois réintégrée dans la société de consommation. Avec notamment le vieil idéal du retour à la nature (comme le montre par exemple le succès en France en 1995 du film "Le bonheur est dans le pré").
En 1972, le roi du Bhoutan a tenté d'imposer la notion du "bonheur national brut", par opposition au plus restrictif "produit national brut" qui ne considère que la richesse matérielle d'un pays.
Étymologiquement vient de l'expression « bon urû ».
Eür est issu du latin augurium qui signifie « accroissement accordé par les dieux à une entreprise ». Ce mot latin est lui-même issu d'une racine indo-européenne (reconstituée) aweg, dont les autres principaux représentants en latin sont :
- augere, auctus : « s'accroître » qui a donné augmenter, ...
- auctor : « qui fait croître », « fondateur », « auteur », qui a donné auteur, autoriser, autorité, octroyer,.
En philosophie
La tradition philosophique occidentale oppose les optimistes, pour qui le bonheur comme "état de satisfaction totale" est possible (Spinoza, Montaigne, Diderot), voire facile (Épicure) et les pessimistes pour qui il est difficile (Rousseau), voire impossible (Pascal, Schopenhauer, Freud). D'autres comme Kant condamnent la recherche du bonheur (comme s'opposant à la morale) ou comme Nietzsche la critiquent comme une fuite devant le tragique de la réalité, lui préférant l'expérience de la joie.Épicure (3eme s. av JC)
Le bonheur est le "plaisir en repos" de l'âme (sérénité) qui naît spontanément de la satisfaction des désirs naturels et nécessaires, dont les deux plus importants sont, outre la sécurité et la santé, la sagesse et l'amitié. "Il est impossible d'être heureux sans être sage". C'est en quoi la voie royale vers le bonheur ne peut être que la philosophie, mère de la prudence.Blaise Pascal (1623-1662)
"Tous les hommes recherchent d'être heureux.(...) C'est le motif de toutes les actions de tous les hommes. Et cependant, depuis un si grand nombre d'années, jamais personne, sans la foi, n'est arrivé à ce point où tous visent continuellement" Pensées (1670)Baruch Spinoza (1632-1677)
Spinoza est sans doute en occident le plus pur philosophe du bonheur, qu'il définit de manière très rationnelle et intuitive comme un sentiment de joie active qu'il distingue du plaisir et de la joie passive, source des passions qui sont la seule source du malheur humain (tristesse, peur, colère, haine...)Toute l'Éthique de Spinoza est une explication de la voie philosophique par laquelle l'homme peut se libérer de la souffrance due aux passions et à vivre avec toujours plus de bonheur en comprenant sa vraie nature par l'usage de la raison. Comme chez les grecs, épicuriens et stoïciens, le bonheur est inséparable de la vertu : "bien agir et être dans la joie". Etre heureux, c'est ressentir la joie de vivre dans la force d'âme, avec courage et générosité, en réalisant ses désirs raisonnables dans un sentiment de liberté intérieure que les passions ne peuvent troubler.
A l'extrême de la libération des passions par la connaissance de la vérité, qui est la compréhension intuitive que tout ce qui existe est en réalité Dieu, c'est-à-dire la nature, le bonheur devient parfait et prend le nom de béatitude, c'est-à-dire joie vécue avec un sentiment d'éternité et s'accompagnant d'un amour de toute chose.
Emmanuel Kant (1724-1804)
Le bonheur est un thème que Kant a traité de manière secondaire dans son œuvre, car contrairement à Epicure ou Spinoza il ne doit pas constituer le but de l'existence humaine, mais bien que son approche soit peu pertinente il est possible de dégager une doctrine kantienne du bonheur.Qu’est-ce que le bonheur ?
Selon Kant la notion même de bonheur pose d’abord un problème, car le contenu concret (empirique) en est impossible à cerner.« Le concept de bonheur n’est pas un concept que l’homme abstrait de ses instincts et qu’il extrait en lui-même de son animalité, mais c’est une simple Idée d’un état, à laquelle il veut rendre adéquat cet état sous des conditions simplement empiriques (ce qui est impossible) » [1]
Kant ne voit donc pas que le bonheur n'est pas une "simple idée" mais bien la réalité d'un sentiment que la conscience reconnait spontanément comme joie accompagnée de plénitude.
De même il pense, à tort, que le bonheur supposerait que nous puissions satisfaire tous nos désirs, pleinement et sans interruption :
« Le bonheur est la satisfaction de toutes nos inclinations (tant extensive, quant à leur variété, qu’intensive, quant au degré, et aussi protensive, quant à la durée) » [2] . … évidemment ce programme est irréalisable ! Mais le bonheur ne demande en réalité que de satisfaire nos besoins, c'est-à-dire nos seuls désirs naturels et nécessaires.
Chacun, sous l’impulsion de sa nature, est cependant porté à rechercher son propre bonheur. Mais du fait de l’irréalisme du contenu du concept, quiconque veut se donner comme impératif dans la vie de se consacrer effectivement à cette recherche sera bien embarrassé :
« Le concept de bonheur est un concept si indéterminé, que, malgré le désir qu’a tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et veut. La raison en est que tous les éléments qui font partie du concept de bonheur sont dans leur ensemble empiriques, c’est-à-dire doivent être empruntés à l’expérience, et que cependant pour l’idée du bonheur, un tout absolu, un maximum de bien-être dans mon état présent et dans toute ma condition future est nécessaire. Or il est impossible qu’un être fini si perspicace et en même temps si puissant qu’on le suppose se fasse un concept déterminé de ce qu’il veut véritablement. .. Richesse ? ….Connaissances ? … Longue vie ? .. Santé ? … Il n’y a donc pas à cet égard d’impératif qui puisse commander au sens strict du mot de faire ce qui rend heureux, par ce que le bonheur est un idéal non de la raison mais de l’imagination. » [3]
Tout cela n’empêche pas bien sûr que chacun ait pour premier mouvement naturel de se mettre à la poursuite de son bonheur propre, et que beaucoup parviennent à le trouver et à le comprendre de manière tout à fait déterminée !
Kant est en fait un moraliste qui veut critiquer l'idée - et la recherche - de bonheur pour y substituer la suprématie du devoir.
Bonheur et devoir
Le bonheur comme fin
Le devoir découle de l’impératif catégorique :« Il n’y a qu’un impératif catégorique et c’est celui-ci : Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu puisses vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle. » [4]
Leur nature propre pousse les hommes à rechercher chacun son propre bonheur, mais cela ne correspond pas à l’essence du devoir moral :
« Le devoir doit être une nécessité pratique inconditionnée de l'action : il doit donc valoir pour tous les êtres raisonnables (les seuls auxquels peut s'appliquer absolument un impératif) et c'est seulement à ce titre qu'il est aussi une loi pour toute volonté humaine. Au contraire, ce qui est dérivé de la nature propre de l'humanité, ce qui est dérivé de certains sentiments et de certains penchants et même, si c'était possible, d'une direction qui serait particulière à la raison humaine et ne devrait pas nécessairement valoir pour la volonté de tout être raisonnable, tout cela peut bien nous fournir une maxime à notre usage mais non une loi...non un principe objectif d'après lequel nous aurions l'ordre d'agir, alors même que tous nos penchants, nos inclinations et les dispositions de notre nature y seraient contraires. » [5]
Poursuivre son propre bonheur n’est donc pas un devoir, c’est un point sur lequel Kant revient très souvent. La dissociation rigoureuse entre devoir et recherche du bonheur repose d’abord sur un argument purement logique :
« Le bonheur personnel est en effet une fin qu'ont certes tous les hommes (en raison de l'impulsion de leur nature) mais cette fin ne peut jamais être envisagée comme un devoir sans que l'on se contredise. Ce que chacun inévitablement veut déjà de soi-même, cela n'appartient pas au concept de devoir.. Il est contradictoire de dire qu'on est obligé de concourir de toutes ses forces à son propre bonheur. » [6]
A cela s’ajoute un obstacle pratique, c’est que les attentes et les désirs des uns et des autres étant contradictoires, si chacun ne recherchait que son propre bonheur, il en résulterait des conflits permanents, ce qui anéantirait toute chance de bonheur :
« Il est donc étrange, alors que le désir du bonheur est universel et par suite aussi la maxime en vertu de laquelle chacun pose ce désir comme principe déterminant de sa volonté, qu’il ait pu venir à l’esprit d’hommes sensés d’en faire pour cela une loi pratique universelle. En effet, alors que d’ordinaire une loi universelle de la nature fait que tout concorde, en ce cas, si l’on voulait attribuer à la maxime la généralité d’une loi, il s’en suivrait exactement le contraire même de l’accord, le pire des conflits et le complet anéantissement de la maxime elle-même et de sa fin…. Découvrir une loi régissant l’ensemble des inclinations tout en satisfaisant à la condition de les accorder complètement, voilà qui est parfaitement impossible. » [7]
Mais le fait qu’il souligne ces difficultés ne signifie pas que Kant soit un ennemi du bonheur. Au contraire, le devoir envers autrui consiste à contribuer à son bonheur :
« Que sont les fins qui sont en même temps des devoirs? Ce sont : ma perfection propre et le bonheur d'autrui. On ne peut pas intervertir les termes... Quand il est question d'un bonheur auquel ce doit être pour moi un devoir de travailler comme à ma fin, il s'agit nécessairement du bonheur d'autres hommes, de la fin (légitime) desquels je fais par là aussi ma propre fin. » [8]
Kant démontre que le devoir de travailler au bonheur d’autrui correspond bien au critère de l’impératif catégorique par le raisonnement suivant :
« Comme notre amour de nous-mêmes ne peut être séparé du besoin d’être aussi aimé par d’autres (et d’en être aidé en cas de danger), comme nous faisons ainsi de nous-mêmes une fin pour les autres et que cette maxime ne peut jamais obliger autrement que parce qu’elle est qualifiée pour former une loi universelle, par suite, par le biais de la volonté de faire aussi des autres une fin pour nous, le bonheur d’autrui est une fin qui est aussi un devoir. » [9]
Si donc le devoir envers soi-même consiste à travailler à sa perfection morale personnelle et non à rechercher son propre bonheur, la dite recherche n’est pas pour autant contraire à la morale, car elle peut contribuer à entretenir la moralité :
« L'adversité, la douleur, l'indigence sont de grandes tentations d'enfreindre son devoir ; l'aisance, la force, la santé et la prospérité en général, qui s'opposent à cette influence, peuvent donc aussi semble-t-il être regardées comme des fins qui sont en même temps des devoirs, à savoir celui de travailler à son propre bonheur et non pas seulement à celui d'autrui. Mais alors ce n'est pas le bonheur qui est la fin mais la moralité du sujet. » [10]
Parvenus à ce stade, nous voyons apparaître une question : si je dois travailler au bonheur d’autrui, mais que je peux aussi travailler au mien propre, comment répartir mes efforts entre ceux qui ont un but égoïste et ceux qui ont un but altruiste ? La réponse de Kant est à la fois imprécise et nuancée :
« Je dois faire aux autres le sacrifice d’une partie de mon bien-être sans espérer de compensation, parce que c’est un devoir, mais il est impossible de déterminer avec précision jusqu’à quelles limites cela peut aller. Il importe beaucoup de savoir ce qui est vraiment un besoin pour chacun suivant sa manière de sentir, et il faut laisser à chacun le soin de le déterminer par lui-même. En effet, exiger le sacrifice de son propre bonheur, de ses vrais besoins, deviendrait une maxime contradictoire en soi si on l’érigeait en loi universelle. Ainsi ce devoir n’est qu’un devoir large, il offre la latitude de faire plus ou moins sans qu’il soit possible d’en indiquer précisément les limites. La loi vaut seulement pour les maximes, non pour les actions déterminées. » [11]
Cependant il ne peut pas tout à fait abandonner l'exigence du bonheur...
Le bonheur comme conséquence
Faire son devoir est la source d’un certain contentement :« L’homme pensant, lorsqu’il a triomphé de l’incitation au vice et qu’il est conscient d’avoir accompli son devoir souvent amer, se trouve dans un état de paix intérieure et de contentement que l’on peut très bien appeler bonheur, où la vertu est à elle-même sa propre gratification. ….Cependant il est clair que, puisqu’il ne peut se promettre cette gratification de la vertu que de la conscience d’avoir fait son devoir, celle qu’on nomme en dernier doit pourtant venir en premier ; c’est-à-dire qu’il doit se trouver obligé de faire son devoir avant même et sans même qu’il pense que le bonheur sera la conséquence de l’observation du devoir. » [12]
Mais le contentement dont il est ici question ne constitue pas un bonheur complet et, dans le monde tel qu’il est, on ne peut espérer que le bonheur de chacun soit proportionné à sa vertu :
« Le bonheur est l’état dans le monde d’un être raisonnable, pour qui, dans toute son existence, tout va selon son désir et sa volonté, et il repose par conséquent sur l’accord de la nature avec le but tout entier poursuivi par cet être, de même qu’avec le principe déterminant essentiel de sa volonté. Or la loi morale, comme loi de la liberté, ordonne par des principes déterminants qui doivent être tout à fait indépendants de la nature et de l’accord de celle-ci avec notre faculté de désirer (comme mobiles) ; d’un autre côté, l’être raisonnable qui agit dans le monde n’est assurément pas en même temps cause du monde et de la nature elle-même. Donc, dans la loi morale, il n’y a pas le moindre principe pour une connexion nécessaire entre la moralité et le bonheur proportionné d’un être qui, faisant partie du monde, en dépend, et qui justement pour cela ne peut, par sa volonté, être cause de cette nature et, pour ce qui est de son bonheur, la mettre par ses propres forces complètement d’accord avec ses principes pratiques. » [13]
Et pourtant, c’est la vertu qui rend digne d’être heureux, et « Pour que le bien soit complet, il faut que celui qui ne s’est pas conduit de façon à se rendre indigne du bonheur puisse espérer d’y participer. »
On se trouve ici devant l’antinomie de la raison pratique : Seule la pratique de la vertu fait mériter le bonheur, mais en fait, selon les mécanismes de la nature, rien ne garantit qu’elle l’obtienne effectivement. Pour résoudre cette antinomie, la raison pratique est conduite à postuler l’immortalité de l’âme et l’existence de Dieu. Celui-ci, dans l’au-delà de la mort, récompense la vertu par le bonheur.
Kant est ainsi un philosophe, non du bonheur, mais de la spéculation, de l'éthique et de la morale.
Friedrich Nietzsche (1844-1900)
« Pour le plus petit comme pour le plus grand bonheur, il y a toujours une chose qui le crée : le pouvoir d'oublier, ou, pour m'exprimer en savant, la faculté de sentir, pendant que dure le bonheur, d'une façon non-historique. Celui qui ne sait pas se reposer sur le seuil du moment pour oublier tout le passé, celui qui ne se dresse point, comme un génie de victoire, sans vertige et sans crainte, ne saura jamais ce que c'est que le bonheur, et, ce qui est pire encore, il ne fera jamais rien qui puisse rendre heureux les autres. Imaginez l'exemple extrême : un homme qui ne posséderait pas du tout la faculté d'oublier, qui serait condamné à voir en toutes choses le devenir. Un tel homme ne croirait plus à sa propre essence, ne croirait plus en lui-même; tout s'écoulerait pour lui en points mouvants pour se perdre dans cette mer du devenir; en véritable élève d'Héraclite il finirait par ne plus oser lever un doigt. Toute action exige l'oubli, comme tout organisme a besoin, non seulement de lumière, mais encore d'obscurité. Un homme qui voudrait sentir d'une façon tout à fait historique ressemblerait à celui qui serait forcé de se priver de sommeil, ou bien à l'animal qui devrait continuer à vivre en ne faisant que ruminer, et ruminer toujours à nouveau. Donc il est possible de vivre sans se souvenir, de vivre même heureux, à l'exemple de la bête, mais il est absolument impossible de vivre sans oublier. Ou bien, pour m'expliquer sur ce sujet d'une façon plus simple encore, il y a un degré d'insomnie, de rumination, de sens historique qui nuit à l'être vivant et finit par l'anéantir, qu'il s'agisse d'un homme, d'un peuple ou d'une civilisation. » (Nietzsche, Considérations inactuelles, II, 1874)Philosophie contemporaine
Longtemps méprisé par les philosophes au profit de la recherche de la vérité ou de la réflexion sur la science, le bonheur est redevenu récemment le centre de la réflexion de certains philosophes dans la lignée d'Épicure et Spinoza, comme André Comte Sponville ("Le bonheur, désespérément"), Clément Rosset("La force majeure"), Robert Misrahi ("Traité du bonheur"), Bruno Giuliani ("Le bonheur avec Spinoza"), Michel Onfray ("L'art de jouir") ou Vincent Cespedes (Magique étude du Bonheur, Larousse, coll. « Philosopher »). Définie comme une "Approbation inconditionnelle de l'existence" (Cl. Rosset), un "Gai désespoir" (Comte Sponville) ou encore "Une addiction à la vie" (Cespedes), la notion de bonheur recouvre le sentiment de "joie sereine associée à la conscience de la bonté de la vie" (Giuliani) et s'enrichit des approches psychologiques comme Csikszentmihalyi("Vivre, psychologie du bonheur) et Christophe André ("Imparfaits, libres et heureux"). La philosophie contemporaine revient donc à l'Éthique comme recherche d'une sagesse pratique au quotidien (Pierre Hadot), ce qui explique sans doute le regain du grand public pour la philosophie.En psychologie
L'approche de la psychanalyse invite à penser la maladie mentale comme manifestation de la sexualité infantile présente en chacun et des traumatismes qu'elle a pu provoquer. Mais cette psychologie s'étend au normal et s'efforce alors de révéler la pulsion, le désir constant, en chacun.L'idée d'un pessimisme freudien est liée à la théorie d'une pulsion de mort. Sigmund Freud considère à partir de 1920 qu'à la sexualité psychique insatiable s'ajoute une tendance à l'autodestruction, à l'anéantissement. Si la psychanalyse des débuts présente un être frustré, blessé, éventuellement choqué par ses désirs sexuels, incapable qu'il est de se les avouer et les tolérer, la psychanalyse d'après 1920 propose donc une vue pessimiste dans laquelle le bonheur est définitivement inaccessible.
Le psychanalyste Jacques Lacan mit un soin particulier à étudier le manque : manque de l'autre, sous toutes ses formes ; si Lacan n'est pas particulièrement pessimiste, il a par contre formalisé cet aspect de l'étude de la vie psychique.
Des psychologues comme Reich, Jung, Perls, Fromm ou Maslow affirment au contraire que le bonheur est le sentiment naturel qu'éprouve la psyché humaine lorsqu'elle s'épanouit d'une manière intégrée, ce qui suppose une forme de culture fondée sur l'amour et l'être plutôt que sur la peur et l'avoir.
Selon Maddux (2002), c’est en mettant l’accent sur les « troubles mentaux » que l’idéologie de la maladie et le DSM ont influencé la conception du fonctionnement humain et de la psychologie clinique : que la psychologie clinique est devenue « pathologique »(p. 39) L’idéologie de la maladie a survécu à son utilité; il est temps de changer la vision qu’ont les psychologues cliniciens de leur discipline de même que le regard du public à son endroit. La psychologie positive offre la possibilité d’une réorientation de notre conception de la psychologie clinique, de la santé psychologique et de l’adaptation humaine. La psychologie positive rejette :
- la catégorisation et la pathologisation de l’expérience humaine ;
- le postulat selon lequel les soi-disant troubles mentaux existent dans l’individu plutôt que dans les relations de celui-ci avec les autres et avec la culture ;
- l’idée que la compréhension de ce qui est le pire et le plus faible chez les humains est plus importante que la compréhension de ce qui est le meilleur et le plus fort.
En sociologie et politique
La sociologie ne théorise pas le bonheur, puisqu'elle a pour seul et unique but d'étudier les comportements des individus les uns envers les autres. Néanmoins, elle constate que la recherche du bonheur est l'un des éléments essentiels de certaines sociétés. Le bonheur n'a cependant pas été défini selon un terme précis en sociologie ; de plus, cette notion étant extrêmement variante entre les individus et les sociétés différentes, une telle définition devrait forcément être relativisée.Un fait politique ?
L'idée que le bonheur soit un objectif politique semble apparaître à la fin du XVIIIe siècle. Elle semble émerger sous une forme institutionnelle aux États-Unis. En 1776, l'article 1 de la Déclaration des droits de l'État de Virginie affirme ainsi que "all men are by nature equally free and independent, and have certain inherent rights of which...[they cannot divest;] namely, the enjoyment of life and liberty, with the means of acquiring and possessing property, and pursuing and obtaining happiness and safety". La formule est reprise dans la Déclaration d'indépendance des États-Unis d'Amérique (1776 également) qui pose : "Nous tenons pour évidentes pour elles-mêmes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux ; ils sont doués par le Créateur de certains droits inaliénables ; parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Les gouvernements sont établis parmi les hommes pour garantir ces droits, et leur juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. Toutes les fois qu'une forme de gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de la changer ou de l'abolir et d'établir un nouveau gouvernement, en le fondant sur les principes et en l'organisant en la forme qui lui paraîtront les plus propres à lui donner la sûreté et le bonheur."En Europe, la notion semble avoir été exprimée pour la première fois sous la Révolution française par Saint-Just avec sa célèbre phrase de 1794, "le bonheur est une idée neuve en Europe." [14].
L'idée de bonheur est revenue sur le devant de la scène politique dans les pays développés à la fin des années 1960, alors que la croissance économique, l'équipement des foyers, l'apparition de la société de loisirs semblait devoir répondre aux attentes de tous les citoyens. Un courant politique critique s'est développé autour de cette question, affirmant que la croissance économique et matérielle ne pouvait suffire à elle seule à apporter le bonheur. Un courant encore plus critique a développé l'idée que la société de consommation, en créant sans cesse de nouveaux désirs dès que les anciens étaient satisfaits, ne pouvait permettre l'accès au bonheur. La mouvance "soixante-huitarde" a ainsi cherché d'autres formes de bonheur, à travers les rencontres humaines, un mode de vie collectif, le retour à la nature, une vie plus simple et dégagée de contraintes, la pratique des arts, etc.
Cette notion d'un "autre bonheur", alternatif à celui proposé par la société de consommation et montré dans les images de publicité, s'est imposé depuis lors. Elle-même d'ailleurs parfois réintégrée dans la société de consommation. Avec notamment le vieil idéal du retour à la nature (comme le montre par exemple le succès en France en 1995 du film "Le bonheur est dans le pré").
En 1972, le roi du Bhoutan a tenté d'imposer la notion du "bonheur national brut", par opposition au plus restrictif "produit national brut" qui ne considère que la richesse matérielle d'un pays.
Études statistiques
Plusieurs équipes de chercheurs ont tenté de rationaliser et de quantifier le bonheur à l'échelle des nations, à des fins de comparaisons internationales.- Des chercheurs de l'université de Rotterdam ont établi un classement mondial du bonheur, établi pour la période 1995-2005 à partir de 953 indicateurs. Les cinq pays les mieux classés sont le Danemark, la Suisse, l'Autriche, l'Islande, la Finlande[15]. Les Français arrivent en 39e position de ce classement[16].
- Le psychologue britannique Adrian White, de l'université de Leicester, a établi en 2007 une carte mondiale du bonheur basée sur cinq critères : santé, richesse, éducation, identité nationale, beauté des paysages. En 2008, c'est le Danemark qui arrive en tête du classement. Selon le quotidien français Libération, « La France a beau afficher d'excellents résultats dans toutes les catégories, elle ne se classe qu'en 62e position[16]. »
- - une hausse des revenus n'augmente pas nécessairement le bonheur[16]. Des chercheurs dirigée par Daniel Kahneman, de l'Université de Princeton, ont montré par une enquête auprès de plus de 1 100 Américains qu'à une augmentation de salaire ne correspond pas d'augmentation significative du bonheur. « Toutes les études montrent à quel point les inégalités (ou sentiment d'injustice ?) sont un facteur d'insatisfaction », relève en 2008 Toger Seidenfaden, rédacteur en chef du quotidien danois Politiken. Le Danemark, premier du classement 2008, est ainsi l'une des sociétés les plus égalitaires du monde[16].
- - Les auteurs d'un rapport français (de 2009) sur les TIC et l'école notent aussi que le Danemark, comme d'autres pays nordiques fait partie des pays qui ont le plus investit dans les NTIC [17].
- - Le sociologue danois Peter Gundelach estime en 2008 que la petite taille et l'homogénéité de la société compte beaucoup pour le bonheur. Ce qui aiderait à constituer une « société de confiance », source de bonheur selon l'économiste danois Christian Bjornskov en 2008[16]. La Suisse arrive ainsi en deuxième position du classement du bonheur mondial 1995-2005.
- - Le maire de Ringkjøbing, la ville supposée être la plus heureuse du Danemark (selon une étude de l'université de Cambridge), attribue le bonheur de ses élus au lien social : « Ici tout le monde se parle, peu importe son statut social. Ce qui est important, c'est le temps passé avec sa famille et ses amis.[16] » De même, la présence d'« îlots de bonheur » au sein d'une population semble démontrer qu'il s'agit d'un « phénomène collectif »[18].
- Le bonheur est un papillon qui, poursuivi, ne se laisse jamais attraper, mais qui, si vous savez vous asseoir sans bouger, sur votre épaule viendra peut-être un jour se poser. (Nathaniel Hawthorne)
- Il n'y a point de chemin vers le bonheur : le bonheur c'est le chemin (Lao-Tseu)
- Le bonheur est tout simplement un état d'esprit dans lequel nos pensées sont agréables de façon quasi-permanente. – Maxwell Maltz
- "Le bonheur est une récompense qui vient à ceux qui ne l'ont pas cherché.", Alain
Articles connexes
Bibliographie
- Alain, Propos sur le Bonheur
- Aristote, Ethique à Nicomaque
- André Comte-Sponville, Le bonheur, désespérément, Editions Pleins Feux, 2000, rééd. Librio.
- René Descartes, Les Passions de l'âme
- Kant, Critique de la raison pure
- Platon, Philèbe
- Épicure, Lettre à Ménécée
- Sénèque, De la brièveté de la vie
- Sénèque, De la vie bienheureuse
- Arthur Schopenhauer, L'art d'être heureux
- Sénèque, "Lettres à Lucilius"
- Matthieu Ricard, "Plaidoyer pour le bonheur"
- Vincent Cespedes, Magique étude du Bonheur (Larousse, coll. « Philosopher », 2010).
Notes et références
- Emmanuel Kant, Critique de la faculté de juger, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 page 1232
- Emmanuel Kant, Critique la raison pure, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 1 page1366
- Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 pages 281/282
- Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 page 284
- Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 page 290
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 page 665
- Emmanuel Kant, Critique de la raison pratique, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 pages 639- 640
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 pages 664 et 667
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 page 675
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 page 668
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 page 675
- Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 3 page 654
- Emmanuel Kant, Critique de la raison pratique, in Œuvres Philosophiques, Bibliothèque de la pléiade tome 2 page 760
- Convention, 3 mars 1794. Rapport à la
- Etude happiness 1995-2005 [archive]
- Libération, 22 septembre 2008, page 19.
- http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000080/0000.pdf [archive] [Réussir l’école numérique ; rapport de la Mission parlementaire Fourgous sur l'école numérique], consulté 2010/02/19
- Fowler JH, Christakis NA, [Dynamic spread of happiness in a large social network: longitudinal analysis over 20 years in the Framingham Heart Study], BMJ, 2008;337:a2338