Louis-Auguste JOINT. Préface de Laënnec Hurbon
Cet ouvrage est un outil indispensable pour toutes les personnes désireuses de comprendre le système éducatif et les contradictions de la société d’Haïti, plus riche des colonies françaises au XVIII° siècle, première république noire depuis 1804, mais considérée aujourd’hui comme le pays le plus pauvre d’Amérique, dont le système scolaire, grandement privatisé, creuse les inégalités. Cette étude est particulièrement un instrument de travail pour les chercheurs en sociologie et en sciences de l’éducation.
par Thelemaque Pierre
L’ouvrage de 526 pages retrace l’évolution du système éducatif d’Haïti en analysant sa logique inégalitaire, la dichotomie français/créole, religion chrétienne (catholique et protestante) vaudou. Les tentatives de réforme, dont la plus importante est celle de 1979 (page 119), ou l’auteur explique les enjeux de cette reforme et ses objectifs.
Je cite cette phrase à la page 120 (« l’école fondamentale a pour vocation essentielle de promouvoir une formation générale de dix ans qui doit conduire le maximum d’enfants à un niveau de connaissances générales et d’initiation aux techniques, indispensables à leur accession aux établissements de niveau secondaire ou à leur entrée dans un processus de production »).
Cette reforme n’a pas abouti aux résultats espérés. L’auteur analyse comment l’enseignement haïtien est basé sur une logique d’inégalité des chances scolaires, et cette logique serait renforcée par les pratiques des écoles catholiques qui remplisse un rôle déterminant dans le fonctionnement du système éducatif. Pour ce faire, il réalise une étude comparative des pratiques pédagogiques et religieuses de trois écoles catholiques congréganistes dans l’air de Port-au-Prince : le Petit Séminaire Collège Saint-Martial (école de garçons), le Collège Saint-Louis de Bourdon (école de filles) et le Collège Juvénat du Sacré-Cœur (école mixte).
A la page 373, paragraphe 3.2. ou l’auteur a fait un état des lieux extraordinaire de la réussite ou de l’échec scolaire dans les écoles congréganistes. Je cite : la qualité des établissements scolaires se vérifie par la réussite de leurs élèves aux examens officiels. On peut aussi s’attarder, pour bien comprendre, le tableau à la page 376.
En Haïti, l’école demeure la clé présupposée de l’ascension sociale. Depuis les années 1970, on constate une forte croissance de la demande scolaire, l’incapacité de l’Etat à répondre à cette demande et le développement incontrôlé dus secteur privé de l’éducation. L’auteur analyse le processus de privatisation de l’école haïtienne et la dérégulation du système : 83% des écoles du pays sont privées et seulement 17% sont publics, elles sont divisés en catégories d’écoles « borlette », sans moyens, d’écoles plus ou moins bonnes et d’écoles internationales. Ainsi, je vous encourage, vous, les lecteurs assidus de Caraïbe Express de procurer ce livre, par sa qualité et son contenu.
Biographie :
Ancien instituteur en Haïti, professeur de philosophie et de sciences sociales en France, Louis Auguste JOINT se spécialise en sociologue et en science de l’éducation. Il est l’auteur de l’éducation populaire en Haïti. Ce nouvel ouvrage est le fruit de sa longue recherche pour le doctorat en sociologie, soutenu en 2005 à l’école des hautes études en sciences sociales, à Paris.