Georges Anglade veut percer le secret du dynamisme littéraire haïtien

Lors d’une conférence intitulée « le secret du dynamisme littéraire haïtien » tenue mardi à l’IFH, le géographe Georges Anglade tente d’expliquer le regain littéraire haïtien à un moment où nos écrivains raflent des distinctions internationales.

Les thèses présentées mardi dernier à l’Institut français d’Haïti par Georges Anglade pour étayer sa pensée sur le dynamisme de la littérature contemporaine haïtienne sont tirées des chroniques hebdomadaires que l’écrivain avait animées dans les colonnes du journal Le Nouvelliste entre 2007 et 2008.

Selon le géographe-écrivain, « le secret du dynamisme littéraire haïtien a sa source dans une triple révolution : économique, géographique et sociale ».

Georges Anglade a si bien maîtrisé le sujet qu’il s’est détaché de sa présentation (proposée pour publication aux Éditions des Presses de l’Université d’Haïti) pour aborder frontalement son thème.

L’intervenant a présenté la nouvelle carte d’Haïti qui ne se limite plus à nos 27.750 km2 compte tenu du contexte de la globalisation et des vagues migratoires que le pays a connues.

D’après le conférencier, la carte d’Haïti au 21ème siècle inclut nécessairement les 4 à 5 millions d’expatriés qui sont en interconnexion avec le pays natal. « L’exode s’est fait en plusieurs moments : exportation de la main-d’œuvre haïtienne lors de l’occupation américaine, fuite des cerveaux sous la dictature des Duvalier, les voyages clandestins », a soutenu Anglade.

Sur le plan économique, le conférencier a retenu les données des derniers recensements de la population en Haïti qui donnent une idée du niveau de vie de l’Haïtien à faible revenu. Ces données montrent que toutes les conditions sont réunies pour de grandes mutations sociales dans le pays où 76% de la population vit avec moins d’un dollar par jour. Les femmes, fort souvent les véritables chefs de famille en Haïti, sont les principales victimes de cette situation.

Georges Anglade a également exploré l’analyse générationnelle pour aider à mieux comprendre l’évolution de la société haïtienne.

Ce contexte intergénérationnel est lié à l’explosion de la production littéraire haïtienne qui tire son originalité dans la manière particulière de raconter des auteurs haïtiens et dans le rire haïtien, selon l’invité des mardis de l’Institut français d’Haïti. Anglade est le principal théoricien de la « lodyans haïtienne », un genre littéraire reconnu comme la contribution d’Haïti à la littérature mondiale.

L’auteur de « L’espace haïtien », manuel de géographie très en vogue en Haïti, considère bon nombre d’écrivains haïtiens comme des « lodyanseurs », à commencer par Justin Lhérisson, en passant par Maurice Sixto, Jacques Stephen Alexis, jusqu’aux contemporains comme Gary Victor et même Dany Laferrière. Cette manière de raconter se retrouve toujours même en filigrane dans de nombreuses œuvres majeures haïtiennes.

Le géographe définit la lodyans haïtienne comme un vieil art centenaire de la voix en de courtes histoires, des miniatures qui illustrent ce trait unique du « rire haïtien », qui vaut bien d’être retenu par la littérature mondiale à côté d’autres labels comme « l’âme russe », « l’humour juif new-yorkais ...»

Né à Port-au-Prince le 18 juillet 1944, Georges Anglade est l’auteur de plus d’une vingtaine de titres publiés entre 1969 et 2001, dont : « Espace et liberté en Haïti » « L'Espace haïtien », « Atlas critique d'Haïti », « Ce pays qui m’habite », « Rire haïtien », entre autres.

Pour cette soirée du 15 décembre, le panel de cette conférence à l’Institut français d’Haïti était composé d’Emmelie Prophète, de Verly Dabel et de Georges Anglade, tous membres du PEN club Haïti qui est affilié au PEN club international, une association mondiale d’écrivains.

Parmi les lauréats et distingués haïtiens de 2009, il faudra mentionner pour rappel Dany Laferrière, Lyonel Trouillot, Yanick Lahens, Edwige Danticat, Louis Philipe Dalembert, Emmelie Prophète et Dominique Batraville.

CJD/HPN