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Religion - Comprendre le Christianisme: Les différences entre catholiques et protestants

Par Joséphine HEINITZ

Nous avons pris l’habitude de parler des chrétiens, en oubliant que le Christianisme réunit des traditions multiples, ressorties au cours des siècles. Bien que chaque chrétien croit en Jésus Christ, fils de Dieu, descendu sur terre pour sauver l’humanité, le carême pratiqué par les uns, mais pas par les autres, est l’occasion de constater des différences, notamment entre les catholiques et les protestants.

C’est le 31 octobre 1517, dans une petite ville en Allemagne que le moine Martin Luther a affiché à la porte de l’église ses 95 thèses. Par ce geste, il a été l’instigateur d’un mouvement révolutionnaire appelé la Réforme, et qui devait aboutir par la suite à la séparation entre protestants et catholiques. Bien que cette Réforme ait été violente et marquée par de nombreuses guerres, les 800 millions des protestants vivent aujourd’hui en paix avec le plus d’un milliard des catholiques et ils ont su se rapprocher les uns les autres au sein de l’œcuménisme. Néanmoins, des différences dans les croyances et pratiques persistent. Et quel meilleur moment que le carême pour revenir sur celles-ci ?

La croix, symbole du Christianisme
Mais avant de s’y lancer, arrêtons-nous un moment sur l’appellation «Protestants» : Ce nom est né en 1529 quand l’empereur allemand Karl V a annulé d’importantes décisions sur le libre choix des princes de leur religion. En réactions, les princes proches de Luther ont voté «la protestation de Spire» exprimant leur opposition. Depuis, ces derniers sont appelés «protestants».

Les points de divergence sur les pratiques portent notamment, sur :

Les quatre soli. La croyance protestante s’épanouit autour des «quatre soli» : sola gratia (par la grâce seule), sola scriptura (par l’Ecriture seule), sola fide (par la foi seule) et solus Christus (seul le Christ). Les différences entre catholiques et protestants sont surtout fondées dans le sola gratia. Tandis que les catholiques croient que l’homme peut contribuer à l’accession de son salut, par exemple par des actes, Luther a postulé que l’homme n’est pas de taille de contribuer à sa rédemption et que le salut est uniquement un don divin. Cette différence théologique va être la source du rejet luthérien d’une quantité des pratiques catholiques.

Non à l’indulgence et la confession. En ce sens, Luther a rejeté toute pratique de la confession. De plus, et ceci a été surtout une épine dans le pied de l’Eglise catholique à Rome, Luther a condamné la pratique de l’indulgence. En effet, la Réforme a vite pris un air politique parce que Luther s’est rebellé contre l’indulgence qui fut pratiquée de manière abusive au Moyen-âge (pour financer entre autres, la grande Basilique de Rome).

Le rejet de l’autorité du Pape. Tandis que les catholiques voient dans en la personne du Pape l’adjoint de Dieu, les protestants rejettent son autorité. Selon Luther, seul Jésus Christ s’est interposé entre Dieu et les croyants. Dans la croyance protestante, le disciple entre directement en contact avec Dieu à travers sa prière.

Sacerdoce universel. Cette dimension personnelle du protestantisme est renforcée par l’idée du sacerdoce universel selon laquelle chaque baptisé est un «prophète, un prêtre et roi». Ceci mène à l’anéantissement des principes de hiérarchie au sein de l’Eglise. Cette institution est désacralisée par Luther qui affirme : «L’Eglise, ce sont des réalités humaines qui peuvent se tromper.» Ce qui n’est pas le cas du clergé catholique, qui revendique un statut divin lui permettant d’accomplir des tâches spéciales.

Ceci se manifeste dans une autre organisation de l’Eglise. La hiérarchie protestante est beaucoup plus démocratique. L’Eglise protestante connaît un synode, une sorte de parlement dans lequel les décisions sont prises à majorité et où les théologiens siègent au même pied que des laïques.

Le pasteur. Le pasteur protestant peut se marier, avoir des enfants et même être de sexe féminin. Le président du Conseil synodal de l’Eglise protestante unie en Belgique, Prof. Dr. Guy Liagre, a dit, s’agissant de sa relation avec le disciple : «Le pasteur est en quelque sorte une sage-femme de la croyance divine.» C’est à travers ses explications de l’Ecriture sainte qu’il aide le croyant à comprendre. Ce dernier est néanmoins lui même capable d’accéder aux paroles de Dieu. Il faut savoir que Luther a été le premier à traduire la bible dans la langue allemande.

Renoncement au monopole d’interprétation de la Bible. Autant différents ont été les trois réformateurs principaux, Luther, Zwingli et Calvin, autant on trouve aujourd’hui des différences au sein des confessions protestantes. Cela est dû au fait que le protestantisme rejette l’idée d’un monopole de l’interprétation de la Bible. (Dans le catholicisme, c’est Rome qui détient ce pouvoir.) Cette liberté est la cause d’un morcellement du protestantisme, qui est, selon le professeur Liagre, «l’une de ses caractéristiques naturelles». De ce fait, nait la nécessité de parler du protestantisme toujours au pluriel.

Le grand philosophe français Jean-Jacques Rousseau a résumé ce principe du protestantisme par les mots suivants : «La religion des uns demande la discussion, celle des autres la soumission. Le catholique doit accepter la décision qu’on lui donne, le protestant doit apprendre à décider de lui-même.»

Pas de saints, ni de culte de Marie. Bien que les protestants voient en Marie la mère de Jésus, elle ne jouit pas chez eux la même admiration que chez les catholiques. L’Assomption est une fête uniquement catholique. Selon le principe soli Deo gloria (seul Dieu a la splendeur) il n’y a rien de saint, divin ou absolu en dehors de Dieu pour les protestants.

La Cène. Avec la dispute autour de la cène, on entre dans les profondeurs de la théologie chrétienne. En effet, il faut savoir que cette dispute a même brouillé les deux réformateurs protestants, Luther et Zwingli. Au centre de la polémique se trouve la question de la signification du pain et du vin consommés lors de la communion. Contacté par téléphone, M. Mawick, attaché de presse de l’Eglise évangélique en Allemagne a expliqué : «En effet, pour les catholiques, le pain et le vin ont été de véritables sacrifices de la messe de Jésus, tandis que pour les protestants, ils sont plutôt une agape de mémoire.» Les protestants croient ainsi plutôt à une présence symbolique de Jésus à l’occasion de la cène, tandis que les catholiques croient à la présence réelle du Fils, appelé «transsubstantiation».

2 et non 7 sacrements. Selon Luther, seulement deux sacrements sont inscrits dans les textes bibliques. On y parle du baptême de Jésus Christ et comment il a instauré la cène, ce qui fait que les protestants célèbrent uniquement 2 des 7 sacrements des catholiques. «Sans doute, les 5 autres sacrements, comme le mariage, peuvent être justifiés, mais pas de façon biblique», a expliqué le théologien Mawick. Comme le dit le soli scriptura, seule la Bible a une autorité théologique pour les protestants.

Le carême. Martin Luther s’est montré critique par rapport au carême, puisqu’il y voyait un acte que les êtres accomplissent pour plaire à Dieu et pour intervenir positivement sur leur salut. Soutenant soli gracia, Luther a ainsi déclaré : «Aucun Christ n’est contraint de faire des actes que Dieu ne lui a pas demandés. Donc, il a l’autorisation de manger à chaque heure, chaque repas.» En ce sens, les baptistes à Dakar ne pratiquent pas le carême.

Mais comme déjà expliqué, les convictions protestantes sont multiples. Même si ce n’est pas à l’image des catholiques, il n’est pas rare de voir des protestants pratiquant le carême. L’idée, c’est de s’abstenir d’une chose choisie individuellement et volontairement. «Pour l’un, cela peut être de l’alcool, pour un autre, du chocolat ou encore la télévision», a indiqué M. Mawick. Le carême protestant est perçu comme «un exercice mental pour soi-même et non pas pour Dieu», afin de s’ouvrir davantage au Saint Esprit.